RSE : 'Say on Climate' et 'Say on Pay' explications :

 

RSE Say on climate SOP Avocat Marseille

Publié le 240426

Sommaire :

1)           Brève introduction :

2)           Les enjeux de ces nouvelles résolutions liées à la finance durable :

2-1 ) Petit rappel de définitions essentielles :

2-1-a )RSE ou Responsabilité Sociétale des Entreprises :

2-1-b)Durabilité :

2-1-c)Finance durable :

2.2 Une petite histoire de la finance durable :

3 )La finance durable : Mesurer la performance extra-financière des entreprises :

4 )« Say on Climate » et « Say on Pay » : Redéfinir la rémunération, le profit et la responsabilité environnementale dans la gouvernance d'entreprise :

4-1 )La résolution Say on Climate :

4-2) La resolution Say on Pay (SOP):

4-3) Les particularités de la Loi Pacte en France pour le « Say on Pay » :

5 ) conclusion provisoire :

 

   1) Brève introduction :

Ces deux termes, cruciaux dans le domaine du droit financier, se rapportent à l'exercice des droits de vote par les sociétés de gestion de portefeuilles( SGP), qui déterminent ainsi comment elles gèrent les intérêts des actionnaires ou des porteurs de parts de ces OPCVM et FIA.

 Le « Say on Climate » concerne le vote des résolutions relatives à la stratégie climatique de l'entreprise lors de l'assemblée générale d'une société cotée.

De manière similaire, le « Say on Pay » s'attache au vote sur la rémunération des principaux dirigeants pendant ces mêmes assemblées.

Dans un contexte où la transparence des entreprises et leur impact environnemental et social sont scrutés par les investisseurs, les clients, et les partenaires bancaires, comprendre ces résolutions de vote et la manière dont les sociétés de gestion de portefeuille (SGP) y participent devient un enjeu crucial pour la réputation.

2) Les enjeux de ces nouvelles résolutions liées à la finance durable 

Dans un précédent article, nous avons exploré la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) et souligné comment cette notion est intrinsèquement liée à la durabilité.

Les termes "Say on Climate" et "Say on Pay" s'inscrivent pleinement dans les nouvelles pratiques qui transforment radicalement la manière dont les entreprises rendent compte de leurs impacts environnementaux et de leurs pratiques internes de partage de la valeur.

Ces résolutions vont au-delà des simples exigences réglementaires; elles établissent un nouveau paradigme où les stratégies climatiques et les politiques de rémunération sont centrales.

Elles deviennent essentielles pour évaluer, lors de l'approbation des comptes annuels, l'évolution de la compétitivité durable d'une entreprise, intégrant ainsi à sa valeur économique sa Responsabilité Sociale et Environnementale.

Ainsi, ces votes permettent aux actionnaires de jouer un rôle actif dans la gouvernance d'entreprise, en les impliquant directement dans les décisions critiques qui influencent non seulement la performance financière mais aussi l'accès aux financements.

Comprendre ces liens et ces implications est essentiel pour tous les acteurs économiques, car ils reflètent une évolution vers une conscience accrue de l'importance de pratiques d'affaires « éthiques et durables ».

2-1 Petit rappel de définitions essentielles :

Pour bien saisir les enjeux de ces deux typologies de résolutions de vote, revenir aux fondamentaux de la finance durable est un excellent "investissement" en connaissance !

Voici quelques définitions essentielles avant d’aller plus loin dans notre exploration.

2-1-a )RSE ou Responsabilité Sociétale des Entreprises :

  • La RSE est une démarche par laquelle les entreprises prennent la responsabilité d'intégrer des préoccupations environnementales, économiques et sociales dans leur modèle économique.
  • Cela signifie penser leur activité économique avec des objectifs de développement durable.
  • La Commission européenne a enrichi cette définition en présentant la RSE comme une démarche de responsabilité vis-à-vis des effets que l'activité économique engendre sur la société, au sens très large.

2-1-b)Durabilité :

Elle repose sur la définition donnée dans le rapport Brundtland de 1987, qui envisage le développement durable comme :

  • « Le développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. »

2-1-c)Finance durable :

  • La finance durable englobe toutes les pratiques qui intègrent des critères "extra-financiers" tels que l'environnement et le social pour orienter la société et l'économie vers un modèle durable.

Dans le cadre du « règlement Européen SFDR », article 2, les acteurs des marchés financiers incluent notamment :

  • les gestionnaires de fonds d’investissement alternatif (FIA)
  • les sociétés de gestion d’organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).
  • (énumération non exhaustive)

2.2 Une petite histoire de la finance durable :

La finance durable est une notion largement façonnée par 2 règlements européens clés, adoptés en réponse à l'Accord de Paris lors de la COP 21, qui est entré en vigueur le 5 octobre 2016.

  • Cet accord vise à limiter l'augmentation de la température mondiale à un maximum de 2°C d'ici 2100.

Pour atteindre cet objectif, la Commission européenne a lancé le « Plan d’action pour financer la finance durable de 2018 », qui a guidé la rédaction de règlements importants :

D’abord le Règlement SFDR (UE 2019/2088 du 27/11/19) - Sustainable Finance Disclosure Regulation ( en français Règlement sur la publication d'informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers):

Ce règlement définit les exigences de transparence pour les produits financiers durables.

Selon l'article 2 §17, ces produits sont définis comme des investissements qui :

  • doivent contribuer à des objectifs environnementaux ou sociaux, tout en respectant les principes de bonne gouvernance.

Ensuite le Règlement Taxonomie (UE du 18/06/20 – 2019/2088) :

Ce règlement établit les critères qui déterminent si une activité économique est durable sur le plan environnemental.

Il exige que les investissements contribuent substantiellement à :

  • des objectifs environnementaux,
  • sans nuire significativement à ces objectifs,
  • et respectent des garanties minimales.

Ces règlements traduisent la volonté de la Commission européenne de réorienter les flux de capitaux vers des investissements « plus durables ».

L'objectif essentiel du règlement Taxonomie est d'atteindre les objectifs de l'Accord de Paris, notamment en réduisant les émissions de gaz à effet de serre et en accentuant la transition énergétique des organisations.

Pour réorienter les flux financiers vers des investissements durables, l'Union européenne a opté pour la régulation par la transparence des informations financières relatives aux instruments financiers.

Une information financière transparente offre une explication loyale et contextualisée, abordant la 'double matérialité' des risques :

  • ceux liés à l'activité de l'entreprise,

 et

  • ceux pouvant impacter la valeur de l'investissement.

Plus cette information est de qualité, plus les investisseurs sont susceptibles de choisir d'investir dans des entreprises qui contribuent activement à la transition énergétique vers une économie décarbonée.

Cette exigence de transparence, qui vise à révéler la durabilité sous-jacente des investissements, s'étend donc à tous les acteurs des marchés financiers, conformément à l'article 2 du règlement SFDR.

Et finalement, c'est cela la finance durable :

  • orienter les capitaux du marché financier vers les entreprises durables.

Cette orientation s'organise par la mise à disposition pour les investisseurs et au-delà, pour tous les financeurs de l'économie, des outils nécessaires pour évaluer non seulement la rentabilité financière, qui reste essentielle, mais aussi quelque chose de nouveau :

  • la compétitivité extra-financière de l'entreprise.

Ces nouveaux outils de la finance durable comprennent

  • la démarche ISR (Investissement Socialement Responsable),
  • et le reporting ESG (Environnement, Social, et Gouvernance).

 Ainsi, l’examen des résolutions de vote « Say on Climate » et « Say on Pay » joue un rôle crucial et inaugure de nouveaux débats lors des assemblées d’actionnaires, pour un appel à l’action et une exigence d'explication de la part des dirigeants sur une gouvernance d'entreprise qui est désormais à multi-facettes.

3° La finance durable : Mesurer la performance extra-financière des entreprises:

Au cœur de l'appréciation de la valeur d'une activité économique par la finance durable, deux outils se distinguent :

  • l'Investissement Socialement Responsable (ISR),

Et

  • les critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG).

L’ ISR ne se limite pas à éviter les investissements non rentables; il intègre également l'évaluation des performances extra financières de l'entreprise.

Ainsi, l'ISR prend inévitablement en compte les données issues de la communication de l'entreprise ou du fonds d'investissement sur sa politique RSE, reflétant son engagement envers les principes du développement durable.

Ces informations extra financières, issues de diverses sources, sont évaluées selon les critères ESG, qui prennent en compte les impacts de l'activité des organisations sur leur environnement, les aspects sociaux, et la gouvernance.

L’appréciation extra-financière de l'activité économique par la démarche ESG provient d'un reporting qui peut être émis par l'entreprise elle-même ou par des tiers, y compris des agences de notation financière.

Cette approche vise à aller « au-delà » d’une simple analyse financière, car la valeur d’une entreprise et/ou d’un investissement s'évalue désormais aussi à travers le prisme de la double matérialité, qui prend en compte les risques associés.

4) « Say on Climate » et « Say on Pay » : Redéfinir la rémunération, le profit et la responsabilité environnementale dans la gouvernance d'entreprise:

Les résolutions « Say on Climate » et « Say on Pay » (SOP) représentent des mécanismes innovants pour améliorer la gouvernance d'entreprise sous deux aspects cruciaux :

4-1 )La résolution Say on Climate :

Cette résolution permet aux actionnaires de s'exprimer sur les progrès de l'entreprise dans sa transition énergétique et ses engagements en matière de développement durable lors de l'approbation annuelle des comptes.

 Elle vise à encourager l'entreprise à démontrer la compatibilité de ses actions avec le principe de "ne pas nuire significativement" (DNSH, Do No Significant Harm en anglais), soutenant ainsi une transition énergétique proportionnée.

Bien que la résolution "Say on Climate" soit valorisée pour sa capacité à stimuler l'information et la discussion, elle n'est pas obligatoire à présenter au vote des actionnaires.

Lors de la conférence du 05 mars 2024 à l’université Paris-Dauphine sur « Finance durable : risques et opportunités pour les entreprises », la présidente de l'AMF, Madame Marie-Anne Barbat-Layani, a souligné l'importance de maintenir cette pratique sur une base volontaire.

Elle a exprimé des réserves quant à la précipitation de rendre ces résolutions obligatoires sans un cadre réglementaire européen plus précis, notamment en ce qui concerne la définition de la "Transition", actuellement basée sur une interprétation conventionnelle du règlement SFDR.

Madame la présidente Barbat-Layani a suggéré que la révision future de ce règlement et la directive CSRD pourraient progressivement aboutir à un vote obligatoire basé sur le rapport de durabilité audité.

En attendant, l'AMF encourage un dialogue actionnarial proactif en attendant des clarifications réglementaires qui façonneront l'avenir de ces pratiques de gouvernance.

4-2) La resolution Say on Pay (SOP):

Il s’agit de fournir aux actionnaires, avant le vote sur les rémunérations des dirigeants, une information transparente qui leur permet de vérifier que la récompense des talents de gestion, tout en étant nécessaire, est réalisée avec équité.

Ce processus illustre l'aspect novateur de l'évaluation de l'activité économique par la « double matérialité », qui intègre dans la notion de « profit » et la rémunération qui en découle, un critère de justesse comptable évaluée à l'aune de l'intérêt social de toutes les parties prenantes.

Ces résolutions concernent principalement les entreprises cotées et représentent un enjeu majeur pour les sociétés de gestion de patrimoine, qui sont tenues de rendre des comptes à leurs actionnaires concernant leur politique de vote.

La loi PACTE, en plus d'encourager toutes les entreprises, y compris les non cotées, à adopter des pratiques similaires, impose des aspects contraignants dans certains cas, notamment pour le vote sur la rémunération des dirigeants.

4-3) Les particularités de la Loi Pacte en France pour le « Say on Pay » :

La pratique du « Say on Pay » en France, en particulier pour les dirigeants des entreprises du CAC 40, découle de l'évolution des attentes en matière de gouvernance d'entreprise et de transparence.

Après la crise financière de 2008, les actionnaires et le public ont exigé une plus grande visibilité sur la manière dont les entreprises rémunèrent leurs dirigeants, ce qui a conduit à l'institutionnalisation de cette pratique en 2013 avec la mise à jour du code de gouvernance AFEP-MEDEF.

En 2014, suite à l’institutionnalisation des pratiques issues du code de gouvernance de l'Afep-Medef, la recommandation permettant aux actionnaires de voter sur les rapports de rémunération des dirigeants a été systématisée.

Cela leur donne un contrôle indirect sur les salaires des dirigeants, en liant la rémunération à la performance de l'entreprise.

Selon Novethic, les premières estimations du Forum pour l'Investissement Responsable (FIR) en 2024 indiquent une baisse des résolutions Say on Pay en Europe, avec seulement 15 résolutions de contestation de vote, contre 26 en 2023.

Cependant, le contexte est particulièrement complexe pour les entreprises en 2024, exacerbé par le surcroît de travail dû à l'implémentation de la directive CSRD.

Cette dernière, effective pour la première fois pour l'exercice 2023, nécessite un investissement interne considérable en compétences pour répondre aux exigences de communication extra-financière.

Cependant, la vigilance reste de mise chez les agences de conseil en vote, comme illustré lors de l'assemblée générale de Stellantis le 16 avril 2024.

 La politique de rémunération proposée pour Carlos Tavares , son dirigeant, a rencontré une opposition, recueillant 29,7% de votes contre, malgré l'excellente performance du groupe.

Les agences de conseil en vote ont recommandé l'abstention face à l'augmentation proposée, jugeant la rémunération du dirigeant disproportionnée par rapport aux standards du secteur.

Bien que la majorité (70%) ait approuvé l'augmentation, le vote de contestation soulève des questions cruciales de gouvernance et de responsabilité sociale qui influenceront les évaluations ESG futures de l'entreprise.

Nous aborderons ces débats complexes et leur impact dans de futurs articles.

En 2017, l'ordonnance Macron a rendu ce vote »Say on Pay » (SOP) non seulement consultatif mais aussi contraignant, obligeant les conseils d'administration à prendre en compte les résultats de ces votes lors de la définition des rémunérations.

Pour les Sociétés Anonymes cotées, l’article 187 de la loi PACTE exige la publication dans leur rapport de gouvernance d’un ratio d’équité, évaluant l’écart de rémunération entre les dirigeants et la rémunération moyenne et médiane des salariés, suivi sur cinq ans et mis en perspective avec les performances de l’entreprise.

5 ) conclusion provisoire :

Les enjeux liés aux résolutions « Say on Climate » et « Say on Pay » (SOP) sont manifestes et se révèlent pleinement lors de la saison des assemblées générales de ce printemps 2024.

Avec les préoccupations croissantes concernant le dérèglement climatique, qui impacte maintenant directement la vie quotidienne, une démarche volontaire émerge, renforcée par les engagements de RSE.

Cette initiative vise non seulement à informer sur l'impact climatique des entreprises mais encourage aussi l'adoption volontaire des pratiques « Say on Climate et Say on Pay », même pour celles non soumises à ces exigences par la loi.

Une communication transparente renforce la cohésion sociale parmi les employés et accroît leur engagement, tout en améliorant le branding des entreprises auprès de leurs clients.

Face à ces défis, la gestion de la durabilité des entreprises devient un enjeu crucial, alliant obligations légales et initiatives volontaires.

Elle nécessite un accompagnement juridique expert pour gérer les risques de contentieux et les enjeux de réputation.

Le cabinet de Maître Véronique Rondeau-Abouly est à votre disposition pour vous guider à travers ces complexités.

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Article publié le Avril 2024

Véronique RONDEAU-ABOULY

Avocat Blockchain et DPO externe.

La rédaction de cet article a été conçue et organisée pour vous soumettre des informations utiles, des axes de réflexion pour une utilisation personnelle ou à visée professionnelle.

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